[Chronique n°13: Audiovisuel] Rubber

Publié le par Draz

Un ami m'enmène voir une avant-première samedi dernier, d'un "film" ou plutôt un concept de long métrage. Même si le "genre" a déjà été expérimenté du temps du cinéma surréaliste (rappelez-vous Le Chien Andalou), Rubber, troisième long métrage signé Quentin Dupieux (un parfait inconnu pour beaucoup je pense), se dresse comme un noble vestige du concept dénué de sens. 
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Quentin Dupieux est sans doute plus connu sous le pseudonyme de Mr. Oizo, un DJ de la scène française relié au célèbre label électro Ed Banger Records (fondé par l'ex-manager des Daft Punk, Busy P, et qui comprend d'autres électriciens comme Justice, Uffie, ou SebastiAn pour ne citer qu'eux) proposant une électro noise dont lui même avoue que le mot d'ordre lors de leur composition n'est autre que "grand n'importe quoi". Outre ses talents reconnus (une nomination aux Brit Awards en 1999 pour son tube Flat Beat) en matière d'électro, le jeune homme se lança en 2001 dans la réalisation de long métrages (Non-Film pour le premier et Steak en 2007 avec le duo comique Eric & Ramzy) et aujourd'hui se trouve dans nos salles sa troisième et dernière réalisation: Rubber.
Rubber, ou la fantastique histoire d'un pneu psychopathe qui voue une haine sans pareil au monde, et ceux qui l'occupent, coupables d'avoir tué sa famille.
Afin de ne rien vous gâcher du mystère qui vous attend en allant voir ce film (et si cela est dans vos projets), je vous invite à ne pas lire les paragraphes suivants et à retournez à vos occupations. Merci, pour vous. 

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Tourné avec simplement deux appareils photo réflex (et quel qualité tout de même!), Rubber est d'entrée de jeu présenté comme un hommage au "No reason" dans une courte mais culte intro où un shériff (joué par Stephen Spinella), sortant d'un coffre de voiture ayant fait tomber chaque chaise de la route que l'on peut voir ci-dessus, s'adresse directement au public et l'interpelle: "pourquoi E.T. l'extra-terrestre est-il marron dans le film de Spielberg? Pourquoi dans le Pianiste de Polanski, son personnage est-il obligé de cacher son talent et d'être un clochard? Ou encore, pourquoi dans JFK d'Oliver Stone, le président se fait-il tué?" Une seule réponse nous est donnée: ce "No reason" intraduit et leitmotiv du film à suivre.

Après une légère mise en abîme consistant à suivre des spectateurs qui eux même suivent un "film" (avec des jumelles et qu'on essaye de faire disparaître) qui est celui des aventures de ce pneu, Robert, le film débute enfin suivant ce personnage atypique vengeant sa famille en tuant tout ce qu'il croise. 
Tout au long de son heure et demie, deux réactions sont possibles: trouver le film plaisant et le prendre comme il vient OU essayer d'y trouver un sens. Comme Pascal en un autre temps, Rubber fait presque l'effet de se retrouver en face de soi mais par la "divertissement" (ce qui détourne littéralement) fatal au premier. On ne cesse de se questionner sur le sens de ces minutes qui défilent et qui finalement se résolvent par un "No Reason" que le film avait d'emblée acquis. 
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Irrationnel, à l'image du "grand n'importe quoi" omniprésent chez Mr. Oizo, Rubber est fascinant et déconcertant pour le peu qu'il aie véritablement un sens (celui de ne pas en avoir, certes). Pour terminer, n'omettons pas le fait que la bande-son est co-signée Oizo et Gaspard Augé (l'une des deux têtes pensantes de Justice) et qu'en fin de compte, en ressortant de la salle, un sentiment étrange nous vient à l'esprit: ai-je participer à une belle expérience ou ai-je perdu une heure et demie de mon précieux et quelques euros. Hélas, l'ambiguité de cet "OVNI" (comme aime déjà l'appeler la presse) ne nous permet pas d'y répondre, et c'est peut être bien mieux ainsi.
Draz 

Publié dans Ce qui se regarde

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